Le retour des sacs en plastique sape les investissements réalisés par les opérateurs pour proposer des substituts en carton et papier. La pénurie mondiale du papier et du carton combinée à l’orientation des opérateurs du recyclage vers l’export est une problématique majeure pour le secteur. La croissance de l’activité suit linéairement celle du PIB.
Un peu plus d’une année après son entrée en vigueur, la loi «Zéro mika» n’a pas eu l’effet escompté sur l’industrie du papier. «Notre profession a accompagné la mise en place de la loi 77/15 d’éradication des sacs en plastique depuis son entrée en vigueur en investissant plusieurs millions de DH. L’objectif était de renforcer le parc machine pour proposer des substituts en papier. Aujourd’hui, les opérateurs se retrouvent à tourner leurs machines quelques heures par mois», concède Mounir El Bari, président de la Fédération des industries forestières, des arts graphiques et de l’emballage (Fifage). Selon lui, la raison de ce manque à gagner est le retour progressif des sacs en plastique dans le marché malgré l’effort louable du ministère de tutelle.
L’utilisation des sacs en tissu comme substitut pourrait également expliquer ce ratage si l’on observe sur le terrain leur taux de pénétration, en l’occurrence dans les grandes surfaces et les commerces.
Autre problématique du secteur : la pénurie mondiale du papier combinée à la nouvelle orientation à l’export des acteurs locaux de la collecte du vieux papier et carton, ce qui a, selon Mounir El Bari, à maintes fois, mis à l’arrêt les lignes de production de GPC et CMCP-International Paper, deux acteurs clés du marché marocain. «Je suis très déçu par la réaction de quelques acteurs du ramassage qui ont privilégié l’export des papiers et cartons usagés dont dépend l’industrie locale alors que cette dernière les a accompagnés pendant 30 ans et a permis au secteur d’atteindre un taux de collecte de 30%», déplore le président de la FIFAGE. Face à cette menace, la profession a riposté en faisant du forcing auprès du ministère de l’industrie et du commerce pour l’interdiction de l’export des papiers et cartons usagés. Un décret de la tutelle est en train d’être affiné au niveau du Secrétariat général du gouvernement.
Néanmoins, le secteur du papier et du carton demeure généralement sur une dynamique de croissance estimée à 3%. «Le secteur accompagne le développement du pays puisque c’est une activité transverse qui sert tous les autres secteurs, en l’occurrence l’industrie et l’agriculture. Il suit donc linéairement la croissance du PIB marocain», explique Mounir El Bari.
Deux leaders du marché réalisent deux gros investissements en 2017
Signe de leur confiance en l’évolution positive de l’économie marocaine, les deux opérateurs clés des secteurs du papier et du carton ont réalisé durant le premier semestre de 2017 deux gros investissements. Récemment, le leader mondial International Paper implanté via sa filiale CMCP-International Paper a concrétisé, fin juin, l’acquisition d’une unité flambant neuve à Tanger auprès d’Europac à 440 millions de DH. «L’usine de Tanger nous permettra d’intégrer davantage nos sites de Madrid et de Kénitra tout en réalisant des synergies avec nos autres caisseries marocaines basées à Casablanca et Agadir dans les domaines de la chaîne d’approvisionnement et de la transformation», précise Eric Chartain, vice-président et DG de l’activité d’emballage en ondulé International Paper EMEA (Europe, Maghreb et Afrique de l’Ouest).
A ce jour, la filiale marocaine du groupe américain dispose de trois caisseries pour une capacité de 250 000 tonnes, ainsi qu’une papeterie à Kénitra et 8 unités de montage de plateaux dans les quatre coins du Maroc. Sur les 10 dernières années, l’investissement moyen par an du groupe s’élève à 60 millions de DH pour la mise à niveau des outils de production, systèmes de sécurité et autres infrastructures des usines. Couvrant tous les secteurs avec un chiffre d’affaires de 1,7 milliard de DH, CMCP-International Paper fournit deux tiers de sa production au secteur de l’agroalimentaire. Migration de la distribution du souk vers les grandes surfaces, plans sectoriels, Zéro mika… Autant de fenêtres d’opportunité ont été avancées par le top management de CMCP-International Paper durant un point de presse tenu vendredi dernier. De son coté, le concurrent marocain du groupe américain GPC (Ynna Holding) avait également renforcé sa capacité de production en avril dernier en activant son usine à l’Atlantic Free Zone de Kénitra, construite sur 5 ha pour 500 MDH. Objectif: fournir PSA ainsi que tous les acteurs de l’écosystème automobile implantés à la fois à Kénitra et Tanger.